Pour une école vraiment exigeante

A La Tribune de Genève, août 2006
Isabelle et Olivier Maulini, Genève

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Nous sommes enseignants depuis vingt-cinq ans. Et parents d'élèves depuis douze, environ. Nous pensons que l'école doit être exigeante, demander beaucoup aux enfants parce qu'ils n'attendent que cela, finalement. Des objectifs clairs, un maître rigoureux, une information régulière et précise constituent l'essentiel d'une bonne pédagogie, du contrat de confiance à nouer entre l'école et les familles. Pour toutes ces raisons, et parce que nous savons que la relégation des plus faibles est le problème, pas la solution, le 24 septembre, nous voterons 2 x NON.

Note ou pas note, telle n'est pas la question. Les meilleurs élèves apprennent quelle que soit la méthode et le système d'évaluation. De quoi ont besoin les autres, ceux qui ne comprennent pas la leçon, qui ne " suivent pas ", qui " décrochent ", qui risquent la " rupture d'école " donc, à terme, l'exclusion ? Les principes de base valent en classe comme à la maison, au moment d'apprendre à lire comme de monter pour la première fois à vélo :

Quel rapport y a-t-il entre ces règles simples et les deux textes soumis au scrutin ? Aucun. Tant l'initiative que le contre-projet proposent, non pas de réduire, mais de constater les échecs : le redoublement en guise de soutien, les moyennes comme stimulation ; ce sont ces méthodes, justement, qui ont montré leurs limites. Elles tirent moins vers le haut que vers le bas. Les systèmes scolaires les plus efficaces ne les pratiquent pas. Ils développent au contraire les aides ponctuelles, les groupes de besoin, une évaluation centrée sur les objectifs à atteindre et des corrections, pas une fois par an, mais tout au long du cycle d'enseignement. Que fait un médecin face à un remède inopérant : double-t-il la dose ou modifie-t-il le traitement ?

Si l'essentiel est vraiment de savoir lire et écrire facilement, pourquoi perdre autant de temps ? Un mauvais lecteur qui redouble refait tout le programme de mathématiques, de géographie, de dessin, de musique et d'éducation physique. Cela fait plusieurs centaines d'heures répétées sans raison, et autant d'occasions galvaudées de se remettre vraiment à niveau. Si un mur est fragile, le maçon renforce l'ouvrage : c'est plus raisonnable que de raser la maison.

Ce que prônent les initiants, aucun de nous ne l'accepterait sur son lieu de travail, de la part de ses collaborateurs ou de son patron. Gâcher des heures de labeur, gaspiller les deniers publics et décourager les efforts : on ne fait pas mieux pour réduire le rendement ! Ne nous y trompons pas : les projets qui nous sont soumis n'offrent au mieux aucune solution ; ils aggravent au pire les risques d'exclusion. Parce que l'ambition de l'école est de prévenir et pas de sanctionner l'ignorance, il n'y a pour nous qu'une exigence : voter 2 x NON.